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OBSERVATIONS

et, des deux côtés, un tchaoury[1] de plumes de paon, garni d’une poignée d’argent. L’autel étoit un peu élevé au-dessus du sol, sur un plan incliné. Devant cet autel se trouvoit une espèce de trône bas, plaqué d’argent, mais trop petit pour qu’on pût s’y asseoir. Il étoit entouré de plusieurs pots de fleurs, et de plusieurs bouteilles d’eau de rose, le tout d’argent : à gauche, il y avoit trois petites urnes qui paroissoient être de cuivre, percées de plusieurs trous pour recevoir les aumônes. On voyoit aussi près de l’autel, sur un pupitre bas, un grand livre, du format d’un in-folio, dont on lit tous les jours des passages durant le service divin : il étoit couvert d’un manteau bleu, sur lequel étoient peints, en lettres d’argent, des passages choisis de la loi de ces sectaires.

Lorsque j’eus conversé long-temps avec deux personnes de l’assemblée qui s’étoient poliment assises à mes côtés sur le tapis, et auxquelles je trouvai beaucoup d’intelligence, on annonça qu’il étoit midi et l’heure de l’office. L’assemblée s’arrangea sur le tapis qui régnoit de chaque côté de la salle, de manière à laisser un espace vide devant l’autel, d’une extrémité à l’autre. On apporta de l’autel, avec quelques cérémonies, le grand livre, le pupitre et tout le reste, et on les plaça à l’extrémité opposée de la salle. Un vieillard, dont la barbe blanche inspiroit la vénération, s’agenouilla devant le pupitre, le visage tourné vers l’autel ; à côté de lui s’assit un homme avec un petit tambour, et deux ou trois autres avec des cymbales. On ouvrit alors le livre, et le vieillard se mit à chanter en observant la cadence du tambour et des cymbales ; à la fin de chaque verset, la plupart des assistans faisoient chorus par une sorte de répons, en donnant de grandes marques de joie. La musique n’avoit rien de rude ; la mesure étoit vive ; et j’appris qu’on chantoit un hymne à la louange de l’unité, de l’omniprésence et de la toute-puissance de la Divinité. Les gestes du vieillard me plurent singulièrement ; je n’ai jamais vu de physionomie qui exprimât aussi bien la joie intérieure,

  1. جِوري C’est un éventail de plumes de paon montées sur un manche d’or ou d’argent. (L-s.)