Page:Reclus - Étude sur les dunes, 1865.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

intempéries, les insectes, l’humidité, les agents chimiques le détruisent, et quand il a disparu, le sable qu’il arrêtait redevient mobile. Le vent, qui n’enlevait les couches superficielles de la dune que pour les remplacer sans cesse par de nouvelles nappes de sable, peut emporter maintenant toute la partie antérieure du monticule ; il allonge le talus d’éboulement aux dépens de la face maritime, et la base de la colline, rongée par le vent, s’éloigne toujours plus du rivage. La dune est en marche ; elle s’avance à la conquête du continent.

Les jours les plus favorables à l’observation de la marche progressive des dunes sont ceux pendant lesquels une douce brise, assez forte toutefois pour pousser le sable devant elle, souffle d’une manière parfaitement uniforme. Du haut de la dune, on voit les innombrables grains de poussière accourir en escaladant la pente ; scintillant au soleil et tourbillonnant comme des moucherons par un beau soir d’été, ils atteignent la cime, puis ils s’accumulent en forme de corniche sur le revers de l’arête, et de temps en temps ils déterminent de petits éboulements qui s’épandent sur la surface du talus comme des nappes d’eau sur le flanc d’un rocher. Lorsqu’un vent de tempête souffle avec violence et par rafales successives, les empiètements de la dune s’accomplissent d’une manière beaucoup plus rapide, mais souvent plus difficile à observer. Les cimes des monticules, qu’enveloppent des tourbillons de poussière, ressemblent à des volcans vomissant la fumée ; la face antérieure de la dune est labourée, ravinée par le vent ; des masses de sables, chargées de débris marins apportés par la tempête, s’écroulent avec bruit et se disposent