Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/37

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férieure fait souvent que deux cours d’eau, naguères parfaitement distincts et indépendants l’un de l’autre, confondent leurs deltas et leurs bouches principales. Nous avons cité l’exemple du Shat-el-Arab. De même, l’Adige et le Pô tendent à se réunir, et c’est par de grands travaux seulement qu’on a pu empêcher jusqu’à aujourd’hui leur jonction complète. Dans le Mississipi, ce fleuve déjà si remarquable à tous autres égards, nous voyons le phénomène de trois fleuves, jadis indépendants, unis maintenant dans le même delta. Autrefois, la rivière Washita descendait à la mer par l’Atchafalaya, qui maintenant est le second bras principal du Mississipi, mais alors était un fleuve à part ; de son côté, la rivière Rouge coulait dans la vallée de la Tèche où elle a laissé des traces nombreuses de son passage. Peu à peu les méandres opposés de la rivière Rouge et du Mississipi se sont rapprochés l’un de l’autre ; à la fin ils se sont confondus et le Washita-Atchafalaya a été pour ainsi dire coupé en deux parties, dont l’une, celle du nord, est devenue l’affluent, et l’autre, celle du sud, l’effluent du Mississipi.

Si des rivières distinctes s’unissent, d’autres, autrefois confondues, se séparent et prennent des directions contraires. Ainsi, par suite de l’exhaussement graduel du Gange, les grandes rivières Saraweti et Gagar, incapables de gravir la pente de plus en plus haute que leur offrait le bord du fleuve, ont été obligées de se diriger vers l’ouest et de se jeter dans le Sutledj. La Sone s’unissait autrefois au Gange, près de la ville de Patna, mais, par la même raison, l’embouchure de cette rivière a été rejetée à plus de 50 kilomètres en amont