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GÉOGRAPHIE.

de sable, est un vent continental également infécond. Aussi pleut-il peu sur le Sahara. Biskara, bien plus humide que la plupart des lieux du Désert, ne reçoit que 280 millimètres par an, et il y a des années n’atteignant pas cette moyenne. Voilà pourquoi le Sahara français, bien que compris entre le 35e et le 30e degré, à 10 degrés au plus de la zone fraîche, est une des fournaises, ou, comme disent les Espagnols, une des poêles de l’univers : si la moyenne y dépasse peu 21, 22, 23 degrés, c’est qu’il y a des nuits froides, et même au-dessous de zéro ; les journées, elles, sont terribles : on a vu 56 degrés à l’ombre, à Touggourt ; et cela dans une oasis où le mercure peut descendre à −8 degrés. L’excès de la chaleur, l’intensité de la réverbération, le vol du sable amènent avec eux leur cortège habituel de maux, avant tout les maladies d’yeux ; mais en somme le climat, vu sa sécheresse, est très salubre, excepté dans les oasis où le flot d’eau qui pourrait baigner des palmiers dort en marais par la paresse des jardiniers du Désert.

Pareil au Steppe, le Sahara vaut mieux que son premier aspect. Avec deux gouttes d’onde on y fait fleurir des paradis sur le sable ou la pierre (paradis surtout par l’enfer qui les environne) ; or, les sources de 50, de 100, de 200 litres et plus par seconde, faites de pluies qu’engouffrent le calcaire et la craie de l’Atlas, sont fort nombreuses, du moins dans le Sahara de Constantine, à l’ouest et à l’est de Biskara ; l’aïn d’où sort la rivière de Mélilli, dans le Zab occidental, donne bien 800 litres par seconde. Et des puits artésiens forés par nous ont fait jaillir de petites rivières : grâce à eux, des jardins flétris reverdissent, des oasis mortes renaissent au bord des ruisseaux enfantés par la sonde ; des oasis nouvelles s’enorgueillissent de leurs jeunes tiges, et chaque année un peu du Grand Désert entre sous l’ombre légère des palmes.

Un homme qui part de Paris le mercredi peut, le dimanche ou le lundi, voir les dattiers de Biskara, ville