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GÉOGRAPHIE.

il ya 668 kilomètres de côtes sans un arbre : le seul qui se dressât sur ce rivage est mort ; c’était un palmier. Avec ce qu’engloutirait d’argent le lac proposé, l’on barrerait assez d’oueds, on ravirait aux profondeurs du sol assez d’eau jaillissante, on bâtirait assez de citernes, on féconderait assez de palmiers et de colonniers pour régénérer le Sahara français et conduire de proche en proche la garnison de Touggourt dans un fort baigné du Niger.


2o L’Oued-Rir. L’Oued-Souf. L’Ighargar et le Hoggar. Ouargla. El-Goléa. Le Mzab et Les Mozahites. — Au sud de l’Oued-Djédi et du saumâtre Melrir se suivent les oasis de l’Oued-Rir, toutes situées dans un bas-fond continuant un long fleuve desséché qui vient du Sahara central, l’Igharghar, dont pour nous l’importance est grande. Rempli jadis, au temps du Sahara pluvieux, par cet Igharghar, l’Oued-Rir n’a point perdu tout passage des eaux ; mais c’est lentement, silencieusement, invisiblement qu’elles coulent, à diverses profondeurs sous le sol. Ce bras de la « Mer sous terre », comme disent les déserticoles, est ici le principe de la vie ; on l’amène au jour par des forages, ou il y vient de lui-même par des puits jaillissants ou par des bahhar (étangs). Nous pouvons nous vanter d’avoir conquis deux fois l’Oued-Rir : par les armes en 1854, et depuis 1856 par des fontaines de 20, 50, 60 et jusqu’à 80 litres par seconde prises par la sonde au flot de l’Igharghar souterrain. Avant nous, les Indigènes creusaient aussi des puits, qui ne valaient pas les nôtres ; mal encoffrés, avec du palmier, bois de rapide pourriture, ils s’effondrent, s’ensablent et souvent tarissent au bout de dix à quinze ans ; si bien qu’à notre arrivée les dattiers mouraient, les oasis se resserraient. Maintenant, grâce aux jets dus à nos sondeurs, près de ces nouvelles sources que les habitants du Rir ont nommées de beaux noms, tels que fontaine de la Paix et fontaine de la Bénédiction, les jardins de notre Désert refleurissent.