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GÉOGRAPHIE.

ves, le Sénégal, possédé par la France, et la Gambie que l’Angleterre ne refuse qu’à demi de troquer avec les Français contre leurs comptoirs de Guinée. Le Sénégal, à son tour, s’appelle ainsi, par corruption, des Zénaga, l’une des principales familles, aujourd’hui bien diminuée, de la grande nation berbère ; lesquels Zénaga, comme d’autres tribus de leur race, ont en partie quitté le Tell pour les parcours du Sahara.

Le Sénégal (2 000 kilomètres) naît dans le Fouta-Diallon, pays de belles Alpes auxquelles on suppose 4 000 mètres de hauteur. Il s’appelle d’abord Bafing : ce qui, dans la langue des Malinkés, veut dire Fleuve Noir. À Bafoulabé, que 1 400 kilomètres séparent de l’Atlantique en suivant le fil de l’eau, le Bakhoy double ou à peu près le fleuve, déjà grand, du moins dans l’humide saison. À 220 kilomètres en aval de ce confluent, au Saut de Gouina, le Sénégal tombe de 146 mètres ; viennent ensuite une cascade de 4 mètres et demi, une autre de 4 mètres, puis la Chute du Félou, qui n’a pas moins de 25 mètres : d’autres disent 30 à 40 suivant que la rivière est en bas étiage ou en crue.

À Médine, port français voisin du Saut du Félou, le Sénégal devient navigable en tout temps pour les embarcations calant un mètre, et la saison des pluies le rend capable de porter des navires très lourds, les averses tropicales jetant dans le lit du Bafing, du Bakhoy, de la Falémé, notable tributaire, et jusque dans les moindres ravins un véritable déluge à partir du mois de mai. Alors les postes échelonnés sur la rive, Médine, Bakel, Matam, Saldé, Podor, Dagana, voient passer devant eux une espèce de Mississipi. Devant Bakel, au plus fort de la crue, en octobre, le fleuve domine de 14 mètres son étiage, à Matam de 9 mètres et demi, à Podor de 6, à Dagana de 4 ou un peu plus, à Saint-Louis de 80 centimètres seulement, le Sénégal baissant de l’amont à l’aval à mesure que l’inondation s’étend au loin dans les deux plaines des deux rivages. Ces divers postes ou