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GÉOGRAPHIE.

3o Le Gabon et l’Ogôoué. — Dans l’hémisphère austral, presque sous l’Équateur, la France, depuis 1842, possède le Gabon, qui est un très grand estuaire de la côte occidentale d’Afrique ; elle y règne sur des Noirs et des Négroïdes idolâtres : Gabonais, Enengas, Boulous, Bakalais, Pahouins, ces derniers race envahissante.

Sur cet estuaire navigable règne un climat néfaste par la chaleur humide que nargue le Noir et qui tue l’Européen ; la température pourtant n’y dépasse guère 32 degrés ; les pluies y sont longues, excessives. Le Gabon engloutit le Como et le Rhamboé, rivières descendues des Monts de Cristal (800 à 1 400 mètres).

Derrière ces montagnes passe l’Ogôoué, grande rivière que les Français ont reconnue jusque près de ses sources. Où nos derniers explorateurs[1] ont cessé de le remonter, ils n’avaient devant eux qu’un rapide torrent de 20 mètres de largeur, évidemment voisin de ses grottes natales.

Le lieu de ses sources est beaucoup moins éloigné de la côte, il est surtout beaucoup plus bas qu’on ne le supposait. Le bas Ogôoué roulant beaucoup d’eau, on comptait sur ce fleuve : il semblait qu’il devait venir de fort loin, comme un Zambèze, un Congo, tout au moins un Sénégal ; et que le pays de sa naissance, porté par de hautes montagnes, était un plateau salubre dominant la bande maremmatique du rivage, comme vis-à-vis, dans un autre continent, les Campos brésiliens, terres saines, commandent la Beiramar, rive dangereuse. Au lieu de cela, l’Ogôoué n’est qu’une rivière torride et péniblement navigable, un cul-de-sac homicide, dans un de ces pays où, suivant le mot terrible du général Duvivier, l’acclimatement n’est qu’une longue méditation sur la mort. L’Ogôoué cependant nous est infiniment précieux, car ses sources touchent aux sources de deux rivières qui

  1. Savorgnan de Brazza, Ballay, Hamon.