Page:Reclus - Histoire d'une montagne, 1880.djvu/166

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
157
LA MORAINE ET LE TORRENT.

rieur, a cheminé dans l’ombre en se gonflant des millions de gouttelettes tombées des fentes de la voûte. La caverne d’où s’échappe le courant change de forme tous les jours, suivant les écroulements et la fonte des glaces ; d’ordinaire, pourtant, il est facile de pénétrer à une certaine distance dans la grotte et d’en admirer les pendentifs, les parois translucides, la lumière bleuâtre, les reflets changeants. L’étrangeté du spectacle, le vague, l’appréhension dont le cœur est saisi, font que l’on se croirait transporté dans un lieu sacré. « Trois fois et mille fois bénis » se croient les pèlerins hindous qui, après avoir remonté le Gange jusqu’à sa source, osent encore pénétrer sous la voûte ténébreuse d’où s’élance la sainte rivière !

C’est avec une grande régularité, dépendante de celle des saisons, que les torrents glaciaires apportent dans les plaines l’eau fécondante et les boues alluviales, provenant de cette énorme officine de trituration qui fonctionne incessamment sous le glacier. Pendant la saison froide de nos zones tempérées, quand les pluies tombent le plus fréquem-