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LE LIBRE MONTAGNARD.

sent lentement le lourd panier tourbillonnant dans l’air.

Si les rochers abrupts des hautes vallées servaient à défendre les populations paisibles contre toute incursion, en revanche les monticules de la plaine servaient souvent de poste de guet et de rapine à quelque baron de proie.

Combien de villages, même dans notre pays, montrent par leur architecture que, récemment encore, la guerre était en permanence, et qu’à chaque heure il fallait s’attendre à une attaque de seigneurs ou de malandrins. Il n’y a point de maisons isolées sur les pentes sans défense ; toutes les mesures, semblables à des moutons effrayés par l’orage, se sont groupées en un seul tas, vaste monceau de pierres. D’en bas, on dirait une simple continuation du rocher, une dentelure de la cime, tantôt éclatante de lumière, tantôt noire d’ombre ; on y monte par des sentiers vertigineux que chaque matin les paysans ont à descendre pour cultiver leurs champs, qu’ils ont à gravir péniblement chaque soir après le long travail de la journée. Une porte seulement donne accès dans la commune, et sur les tours