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CHAPITRE XIX


l’adoration des montagnes


L’adoration de la nature existe encore parmi nous, beaucoup plus vivace qu’on ne le croit. Combien de fois un paysan, en découvrant sa tête, m’a montré le soleil du doigt et m’a dit avec solennité : « C’est là notre Dieu ! » Et moi aussi, le dirai-je ? combien de fois, à la vue des cimes augustes qui trônent au-dessus des vallées et des plaines, n’ai-je pas été naïvement tenté de les appeler divines !

Un jour je cheminais paisiblement dans un défilé penchant et tout obstrué de pierres roulantes. Le vent s’engouffrait dans le passage et me fouettait la figure, en apportant à chaque bouffée un brouillard de pluie et de neige à demi fondue. Un voile grisâtre me