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L’ADORATION DES MONTAGNES.

pose : mais n’a-t-il pas, dans l’archipel, nombre de montagnes sœurs qui versent encore des fleuves de feu sur le sol frémissant ? Parmi ces monts, il en est un, le plus terrible de tous, que l’on crut devoir fléchir en lui jetant en offrande des milliers de chrétiens. C’est ainsi que, dans le Nouveau-Monde, on aurait tenté de calmer le Monotombo en y précipitant des prêtres qui avaient osé prêcher contre lui, dire qu’il n’était pas un dieu, mais une bouche de l’enfer. D’ailleurs, les volcans n’attendent pas d’ordinaire qu’on leur jette des victimes ; ils savent bien les saisir eux-mêmes, quand ils fendent la terre, vomissent des lacs de boue, recouvrent de cendres des provinces entières. Ils font périr d’un coup les populations de tout un pays. N’est-ce pas assez pour les faire adorer de tous ceux qui s’inclinent devant la force ? Le volcan dévore, donc il est un dieu !

Ainsi la religion des montagnes, de même que toutes les autres, s’est emparée de l’homme par les divers sentiments de son être. Au pied de la montagne vomissant des laves, c’est la terreur qui l’a prosterné la face contre terre ; dans les campagnes altérées, c’est le désir