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HISTOIRE D’UNE MONTAGNE.

rêver leur présence dans ces palais fantastiques, construits en un instant par les rayons du soleil sur les cimes resplendissantes et disparaissant non moins vite, comme des rêves ou de vains mirages !

Dieux et génies sont les personnifications de ce que l’homme redoute et de ce qu’il désire. Toutes ses terreurs, toutes ses passions prenaient jadis une forme surnaturelle. Aussi, parmi les esprits de la montagne, les uns sont-ils de redoutables magiciens qui brûlent l’herbe des pâturages, tuent le bétail, jettent un sort aux passants ; les autres, au contraire, sont des êtres bienveillants dont une jatte de lait répandue ou même une simple incantation concilie les faveurs. C’est au bon génie que s’adresse le berger pour que ses troupeaux s’accroissent d’agneaux vigoureux et de génisses sans tache. C’est à lui surtout que jeunes et vieux, hommes et femmes, demandent ce qui malheureusement serait pour presque tous la joie suprême de la vie, de l’or, des richesses, un trésor. De vieilles traditions nous racontent comment les génies de la montagne se glissent dans les veines de la pierre, pour y insérer