Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sion ou de métier ; nous ne sommes plus ni ouvriers, ni marchands, ni professeurs, ni médecins ; nous oublions pour une heure outils, livres et instruments et, revenus à l’état de nature, nous pourrions être tentés de nous croire encore à ces âges de pierre ou de bronze, pendant lesquels les peuplades barbares dressaient leurs cabanes sur des pilotis au milieu des eaux. Pareils aux hommes des anciens jours, nous sommes libres de toute convention, notre gravité de commande peut disparaître et faire place à la joie bruyante ; nous, civilisés, qu’ont vieillis l’étude et l’expérience, nous nous retrouvons enfants, comme aux premiers temps de la jeunesse du monde.

Je me rappellerai toujours avec quel étonnement je vis pour la première fois une compagnie de soldats s’ébaudir dans la rivière. Encore enfant, je ne pouvais m’imaginer les militaires autrement que sous leurs habits multicolores, avec leurs épaulettes rouges ou jaunes, leurs boutons de métal, leurs divers