Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/317

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à leur profit, il faut qu’ils cessent d’en craindre les écarts et soient maîtres d’en régler le débit suivant leurs besoins. Et même quand la science leur fournira les moyens d’apprivoiser le fleuve et de le mener à la laisse, ils seront impuissants tant qu’ils resteront isolés dans leurs travaux et ne s’associeront pas afin de régulariser de concert la force encore brutale de la masse d’eau qui coule presque inutile devant eux. Comme nos ancêtres, nous sommes toujours forcés de regarder le fleuve avec une sorte de terreur religieuse, puisque nous ne l’avons pas dompté. Ce n’est point, comme le ruisseau, une gracieuse naïade à la chevelure couronnée de joncs ; c’est un fils de Neptune qui de sa formidable main brandit un trident.

Pour contempler dans toute sa majesté un de ces puissants cours d’eau, et comprendre qu’on a sous les yeux une des forces en mouvement de la terre, il n’est pas besoin de faire un long voyage, de traverser l’ancien monde et d’aller visiter près de leur embouchure le