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l’homme et la terre. — le nouveau monde et l’océanie

pour les navires de mer. C’est là que s’élève Richmond, qui possède aussi une certaine importance, historique surtout, puisqu’elle fut pendant quatre années la capitale de la confédération esclavagiste. Mais cette ville, quoique la plus ancienne de toutes celles qui forment la guirlande des cités atlantiques, n’a pu se développer, en partie par suite de ses moindres avantages nautiques, mais principalement à cause des conditions économiques du travail qui prévalurent dans la contrée, jusqu’à une époque récente : le régime de l’esclavage et de la grande propriété, ainsi que la routine du commerce du tabac, n’étant point de nature à développer l’initiative locale. Encore aujourd’hui, les immigrants européens fuient les États du Sud.

Au delà des Alleghanies et des diverses chaînes de montagnes qui les prolongent au nord et au sud, les premières colonies de blancs américains existaient à peine en 1790, époque du premier recensement. Même en 1800, alors que le noyau primitif des treize colonies fédérées s’était augmenté de quelques unités, la bande de territoire s’étendant des Grands Lacs au golfe du Mexique et formant aujourd’hui les neuf États, Wisconsin, Michigan, Illinois, Indiana, Ohio, Kentucky, Tennessee, Mississippi, Alabama, n’avait guère que 400 000 habitants blancs, dont plus de la moitié étaient établis le long de la rive gauche de l’Ohio. La population de ces mêmes États dépasse maintenant 24 millions d’individus, forme donc près du tiers de la république Américaine. Le plus grand effort de transformation se porte pour le moment vers les États nord de cette région.

Les grands centres d’attraction et de rayonnement sont tous nés spontanément suivant les conditions déterminantes du milieu. Tout naturellement les cités les plus actives et les plus commerçantes devaient se succéder sur la rive ou dans le voisinage immédiat de la Méditerranée canadienne, là où des points d’arrêts nécessaires ont obligé les colons à établir leurs dépôts, magasins et chantiers, noyaux primitifs autour desquels les hommes affluèrent plus ou moins rapidement par milliers, dizaines ou centaines de milliers. Ainsi, Buffalo, remplaçant des prairies que les troupeaux de bisons parcouraient, il y a deux cents ans, est née au bord d’un havre bien abrité, à l’endroit même où les eaux du lac Erié commencent à se presser et à fuir dans le lit du fleuve Niagara, interrompu plus bas par sa formidable chute. Cleveland, vers le milieu de la rive méridionale du lac, le domine du haut d’une terrasse jadis boisée, et