Aller au contenu

Page:Reclus - L'Homme et la Terre, tome VI, Librairie universelle, 1905.djvu/156

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
140
l’homme et la terre. — le nouveau monde et l’océanie

rielle et d’audace. Puis, au milieu du Pacifique, s’étale le formidable continent australien, qui fut jadis une simple dépendance de l’Europe et qui se rattache encore à elle par la direction de presque tout son mouvement commercial ; il constitue également un centre de domination pour les terres environnantes : une partie de la Nouvelle-Guinée reçoit de la république d’Australie ses explorateurs et ses immigrants ; les îles Fidji se trouvent dans son rayon d’exploitation capitaliste, et déjà la Nouvelle-Calédonie et les îles voisines, qui appartiennent à la France ou que celle-ci convoite, ont donné lieu à d’aigres remontrances de la part des Australiens, qui se prétendent d’avance les maîtres des immensités du Pacifique. A cet égard, ils ne peuvent manquer d’entrer en conflit avec les Américains du Nord, qui possèdent un câble télégraphique à travers toute l’étendue de l’Océan, entre San-Francisco et les Philippines par les escales d’Honolulu, dans les Havaïi, et de Guam dans les Mariannes.

La plus grande part du sablé des îlots dans les parages orientaux du Pacifique est attribuée à la France, fait qui n’a du reste aucune valeur dans l’équilibre général de la puissance des Etats, car presque toutes les îles, sauf Taïti, sont de faibles dimensions et ne pourront jamais prendre d’importance réelle pour leurs productions et leur commerce : elles donnent simplement une petite satisfaction d’amour-propre aux militaires de la nation suzeraine qui plantent leur pavillon à l’entrée des passes et sur les promontoires fortifiés ; en outre, elles fournissent au budget de la métropole l’occasion d’aligner quelques millions de dépenses aux frais des contribuables. C’est tout, mais les petites populations locales intéressent par leurs migrations d’île en île, par les contrastes d’accroissement ou de diminution des habitants, par toutes les questions économiques relatives au développement ou à la décadence de la race, et surtout par les variations étonnantes que subissent les insulaires suivant le milieu qui les entoure et leur donne son empreinte. A cet égard, il importe d’étudier l’Océanie dans son ensemble, sans tenir compte du partage qu’en ont fait les puissances européennes, suivant les hasards de la navigation, les exigences des missionnaires et les décisions de diplomates plus ou moins compétents qui n’avaient point vu les îles distribuées par eux.

On peut suivre à la trace les migrations des Polynésiens par les noms qu’ils ont donnés à leurs diverses étapes, depuis le Havaï-ki pri-