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tablier de kaoueh

bles se ressemblent pour la plupart ou proviennent d’une souche commune ; de même, les termes qui désignent les animaux domestiques sont parents dans les parlers aryens de l’Orient et de l’Occident, tandis que les mots ayant rapport aux choses de la guerre, de la chasse et aux animaux sauvages appartiendraient presque tous aux langues d’origine postérieure, indiquant ainsi que des époques troublées avaient succédé dans tous les pays d’immigration à une période de grande tranquillité primitive[1].

D’après une photographie de J. de Morgan
(Mission archéologique en Perse)


stèle de chutruk nakhonte {voir page 412)

D’après le « Livre des Rois », les premiers Iraniens ne goûtaient pas encore à la chair des animaux et ne connaissaient d’autre nourriture que les racines, les graines et les fruits. Firduzi nous raconte comment on réussit à transformer Zohak, jeune prince doux et charmant, en un monstre de scélératesse : après lui avoir fait prendre un œuf, puis plusieurs, on l’habitua graduellement à manger de la viande, cuite, puis crue, et finalement on en fit cet abominable cannibale dont triompha le forgeron Kaoueh portant comme étendard son tablier de cuir. Cette éducation sanglante est un symbole : la révolution produite dans les mœurs par l’alimentation carnivore avait coïncidé probablement avec de grandes guerres entre les habitants du plateau et les gens de la plaine d’en bas.

Les documents laissés par l’histoire primitive sont insuffisants pour énumérer toutes les parties de l’immense héritage légué à l’humanité par le monde iranien : découvertes et métiers, conceptions philoso-

  1. Max Müller, Essais de Mythologie comparée, trad. G. Perrot, pp. 53, 54.