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journal de la commune

vingt-quatre heures pour connaître des crimes qui lui seront déférés.

« Art. 3. — Le jury statuera dans les quarante-huit heures.

« Art. 4. — Tous accusés retenus par le verdict du jury d’accusation seront les otages du peuple de Paris.

« Art. 5. — Toute exécution d’un prisonnier de guerre ou d’un partisan du gouvernement régulier de la Commune de Paris sera, sur-le-champ, suivie de l’exécution d’un nombre triple des otages retenus en vertu de l’article 4, et qui seront désignés par le sort.

« Art. 6. — Tout prisonnier de guerre sera traduit devant le jury d’accusation, qui décidera s’il sera immédiatement remis en liberté ou retenu comme otage. »

Paris, 7 Avril 1871

Le peuple est convoqué à l’enterrement des gardes nationaux morts pour la défense de Paris. Plusieurs milliers de citoyens se pressent aux abords de l’hôpital Beaujon.

Cinquante à soixante cercueils (hélas ! les morts étaient plus nombreux) sont empilés sur trois grands chars funèbres, traînés chacun par quatre chevaux, couverts de robes de deuil. Aux angles des corbillards étendant leurs plis comme un manteau de gloire sur les victimes, les bières sont jonchées d’immortelles qu’on distribue aux assistants : « Souvenez-vous ! »

Tambours et trompettes éclatent en sons douloureux et solennels. À pas lents on marche vers le cimetière. Delescluze, l’intègre républicain, le vétéran de nos luttes, prononce un discours fier et sombre, qui vibre dans nos cœurs, tristes également mais non abattus.

Malgré les désastres qui, coup sur coup, suivent la naïve expédition de Versailles, le peuple de Paris ne désespère pas, au contraire, — il faut d’autres coups que ceux-là pour faire fléchir son courage.

« C’est la guerre sainte ! » me dit, les yeux brillants d’une sombre flamme, un cordonnier de mes amis que, depuis dix ans, j’ai appris à honorer et à estimer dans toutes nos œuvres démocratiques. C’est un homme doux et enthousiaste, mystique, et d’une probité faite de dévouement communiste.