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Page:Reclus - Les Primitifs.djvu/129

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la vie, une flamme.

éléments. La première tombe dans l’air, y suscite la puissance créatrice ; la seconde tombe dans l’eau, de là entrera dans les veines des animaux pour réveiller l’amour ; la troisième tombe sur terre, fera bourgeonner les plantes[1].

—  C’est bien cela ! disent les Hyperboréens, mais nous allons vous conter la chose par le menu :

À l’an nouveau la Mère Gigogne du pôle monte de son taudis enfumé, au fond de la mer, s’assied devant une hutte, qui ouvre sur le Midi, aspire l’air frais, éternue, renifle à plaisir. Restaurée, ravigotée, elle quiert sa grande lampe, la garnit, versant de l’huile, versant encore, puis elle allume quand tout déborde. L’huile flambe ; au contact du sol, les flammèches et gouttes brûlantes se font animaux qui respirent, herbes qui verdoient, boutons qui fleurissent. Mère-Grand asperge les airs qu’emplissent les bruissements des oiseaux prenant leur volée ; Mère-Grand asperge les eaux, et poissons de frétiller. Quand la Vieille est de bonne humeur, elle s’amuse au jeu, fait pleuvoir le lard fondu ; en tant que Mère Abonde elle fait foisonner toute créature ; mais quand elle se montre en Chiche Face, vilaine Chiche Face, il faudra se serrer le ventre. Pourquoi conduite si dissemblable ? C’est que la mémé est de bonne ou de mauvaise humeur ; de mauvaise, quand les poux et autres acarus la piquent, lui causent des impatiences. Aux angakout de prévoir la chose, et dans la visite qu’ils lui font, de l’égayer par un bout de causette, tout en nettoyant sa chevelure[2].

  1. Bastian, Voelkerpsychologie.
  2. Rink.