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les inoïts orientaux.

indigènes n’ont jamais dépassé le Cap-Union. Même en juillet et août, le littoral serait trop pauvre pour fournir à la subsistance d’une poignée d’Esquimaux errants, et quant à une résidence d’hiver, il ne peut en être question[1]. Le point le plus septentrional où on ait reconnu quelque évidence du séjour est le cap Beechey, par le 81e 54’ latitude nord. Le naturaliste de la mission Markham y recueillit la carcasse d’un grand traîneau, une lampe de stéatite, un racloir à neige, fait d’une dent de morse, débris probables de quelque expédition. Au delà de ce parallèle, aucun de nos semblables n’a vécu sans doute. Les Inoïts ne poussent pas leurs courses plus loin[2]. »

Déjà Hudson, avec son navire à voiles, avait pénétré en 1607 jusqu’à près du 82e degré. Parry, avec son voilier, toucha, en 1827, la latitude 82e 45’. Nares, avec son vapeur, n’atteignit que 82e 16’, et avec son traîneau 83e 20’. Il y a lieu de s’étonner que les modernes, avec toutes les ressources de la science et de l’industrie, aient pu à peine dépasser les premiers navigateurs[3].

Grande était la distance qui séparait nos climats tempérés de ces régions glacées. Nous allâmes aux Esquimaux et les reconnûmes de suite pour être des hommes, mais ils nous prirent pour des revenants. Depuis les siècles qu’ils vivaient dans leurs plaines neigeuses, ils croyaient peut-être, à part quelques Indiens, habiter seuls le monde ; ils ne connaissaient pas l’existence des Européens, même par les ouï-dire qui se transmettent de proche en proche. Quand le vaisseau de Ross aborda leurs parages en 1818, les braves Itayens se figurèrent avoir été

  1. À.-H. Markham, la Mer Glacée du pôle.
  2. Nares, Voyage à la mer Polaire.
  3. Tyson.