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relevailles.

ne souffre dans les siennes. Cette dernière croyance n’est point particulière aux Inoïts, tant s’en faut ; nous la retrouvons dans l’Inde[1], en Abyssinie et au Zanzibar. Nous connaissons des légendes suédoises, qui racontent comment la dame châtelaine vint à mourir ou avorter, parce que son chevalier, sans prendre garde, avait tué une biche pleine.

Avec une tendre sollicitude, les bonnes amies versent, sur la tête de la femme en travail, le contenu d’un pot de chambre, pour la fortifier, disent-elles. Après la délivrance, elles coupent le cordon ombilical avec les dents, quelquefois avec un coquillage tranchant, jamais avec ciseaux ni couteau ; et ce cordon est gardé avec grand soin pour qu’il porte bonheur au nouveau-né. Sitôt qu’il lui est possible, la jeune mère mange d’un hachis dans lequel on a fait entrer de bons morceaux : le cœur, les poumons, le foie, l’estomac, les intestins de quelque robuste animal — moyen de procurer au nourrisson santé, vigueur et longue vie. Pendant quelques jours, aucun feu n’est allumé dans la hutte, rien ne sera mis à cuire au-dessus de la lampe domestique, — aucun os ne doit être emporté hors de la demeure, — le père et la mère ont chacun son broc, auquel il est à tout autre défendu de boire ; –pendant six semaines il est interdit aux parents de manger dehors, à la mère de passer le seuil de la porte. Ce terme expiré, elle fait sa tournée de visites, habillée de neuf, et jamais plus elle ne touchera les vêtements qu’elle portait lors de ses relevailles. Durant une année, elle ne mangera jamais seule, — toutes prescriptions auxquelles, en cherchant bien, on trouverait des parallèles dans notre « Évangile des Quenouilles ».

  1. Cfr. Maha Bharata, Adi Parva.