Page:Regnard - Œuvres complètes, tome troisième, 1820.djvu/382

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Démophon

Comment !
D’où vous vient pour l’hymen ce brusque éloignement ?
Vous n’avez pas tenu toujours un tel langage.

Isabelle

Il est vrai ; mais enfin l’esprit vient avec l’âge.
J’en connois les dangers. Aujourd’hui les époux
Sont tous, pour la plupart, inconstants ou jaloux ;
Ils veulent qu’une femme épouse leurs caprices :
Les plus parfaits sont ceux qui n’ont que peu de vices.

Démophon

Celui-ci te plaira quand tu l’auras connu.

Isabelle

Tel qu’il soit, je le hais avant de l’avoir vu :
Il suffit que ce soit un homme de province ;
Et je n’en voudrois pas, quand ce seroit un prince.

Le Chevalier

Se montrant.

Madame, il ne faut pas si fort se déchaîner
Contre le malheureux que l’on veut vous donner :
Si vous le haïssez, il s’en peut trouver d’autres
De qui les sentiments différeront des vôtres.

Isabelle

A part.

Que vois-je ? Juste ciel ! Et quel étonnement !
C’est Ménechme, grands dieux ! C’est lui, c’est mon amant.

Démophon

Au Chevalier.

Je suis au désespoir qu’un dégoût téméraire
Ait rendu son esprit à mes lois si contraire :
Mais je l’obligerai, si vous le souhaitez…