Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/270

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cependant je ne me serais pas endormi sans m’être d’abord protégé contre leurs attaques.

Il y avait encore un autre motif à l’indifférence relative qu’ils m’inspiraient : la nécessité d’agir était si impérieuse, que je n’avais pas le temps de m’abandonner à des plaintes plus ou moins chimériques ; et le danger qui me menaçait d’une mort presque certaine faisait pâlir tous les autres.

Lorsque j’eus vidé la caisse, je me décidai à prendre un peu de repos et à faire un léger repas. J’avais tellement soif, que je me sentais de force à boire un demi-gallon ; et comme j’étais sûr que l’eau ne me manquerait pas, je me désaltérai complétement ; le précieux liquide me semblait avoir une douceur inaccoutumée, il surpassait l’ambroisie, jamais nectar ne fut préférable, et quand j’eus avalé mon dernier verre, je me sentis allègre et fort depuis la racine des cheveux jusqu’à la plante des pieds.

« Je vais maintenant, pensais-je, m’affermir dans cet état de bien-être en mangeant un morceau. » Mes mains s’avancèrent dans la direction du chiffon de drap qui me servait de garde-manger, trésor d’une valeur…. Mais un cri d’effroi sortit de ma bouche : « Encore les rats ! » Ces bandits infatigables étaient revenus, avaient percé l’étoffe et dévoré une nouvelle part de ma réserve ; il avait disparu de mon reliquat au moins une livre de