Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/289

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pusse m’y introduire,—il n’y avait pas besoin qu’elle fût bien grande pour cela,—et aussitôt que mon accès de toux avait été calmé, je m’étais glissé dans la barrique.

Je cherchai la bonde, afin d’y passer mon couteau ; quelle que fût sa dimension, c’était autant de besogne faite, et il est plus facile de continuer à couper une planche que d’y faire la première entaille. Je trouvai l’ouverture que je cherchais, non pas à l’endroit que je supposais qu’elle devait être, mais sur le côté de la barrique, et juste à un point convenable.

J’avais fait sauter le bondon, et je travaillais avec ardeur. Mes forces me paraissaient décuplées, c’était merveilleux ; quelques minutes avant j’étais fatigué, et maintenant je me sentais capable de défoncer le tonneau, sans en couper les douelles.

Était-ce le bien-être que j’éprouvais de cette vigueur, ou la satisfaction qu’elle me donnait ? Mais j’étais plein de gaieté, moi qui ne la connaissais plus ; on aurait dit qu’au lieu de faire une besogne pénible, je me livrais au plaisir ; et je ne me souciais pas mal du succès de l’entreprise.

Je me rappelle que je sifflais en travaillant, et que je me mis à chanter comme un pinson. Plus d’idées noires ; celle de la mort était à cent lieues ; tout ce que j’avais souffert me paraissait un rêve ; je ne savais plus que j’avais besoin de manger ;