Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/296

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lorsque j’avais eu soif, et il était possible que j’y eusse laissé mon couteau ; il s’y trouvait effectivement, la lame enfoncée dans la douelle que j’étais en train de couper.

Il vous est plus facile de vous figurer ma joie qu’à moi de vous la dépeindre ; mes forces et mon courage s’augmentèrent de cet incident ; et sans perdre une minute je me remis à la besogne. Mais, à force de servir, mon couteau s’était émoussé ; il avait plus d’une brèche, et mes progrès étaient bien lents à travers cette planche de chêne, qui me semblait dure comme la pierre. Il y avait un quart d’heure que je travaillais de toutes mes forces ; à peine avais-je prolongé mon entaille de trois millimètres, et je commençais à me dire que je ne couperais pas toute la douelle.

L’étrange influence se faisait de nouveau sentir ; je m’en aperçus alors. J’en connaissais le péril, et cependant je m’y serais abandonné sans peur, car l’insouciance est l’un des effets de l’ivresse. Néanmoins, je m’étais promis de sortir du tonneau dès les premiers symptômes de vertige, quelque pénible que cela pût être, et j’en eus heureusement la force. Quelques minutes de plus, je perdais connaissance dans la futaille, ce qui aurait été le prélude de mon dernier sommeil.

Toutefois, lorsque les premières atteintes de l’ivresse se dissipèrent, j’en vins presque à regretter