Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/34

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que je parcourais dans tous les sens. Il était rare que je n’eusse pas un compagnon ; la plupart de mes camarades partageaient mes goûts maritimes, et plus d’un parmi eux m’enviait le privilége d’être le maître d’un bateau.

Nous étions néanmoins assez sages pour ne sortir que lorsque la mer était calme ; Henry me l’avait bien recommandé ; nos excursions d’ailleurs ne s’étendaient pas au dehors de la baie, et je poussais même la prudence jusqu’à ne pas m’éloigner de la côte, de peur que notre esquif ne fût saisi par un coup de vent qui l’aurait mis en danger.

Cependant, à mesure que j’acquérais plus d’habitude, je devenais moins timide. Je me sentais chaque jour plus à l’aise ; et, voguant en pleine eau, j’allai sans y penser à plus d’un mille du rivage. Henry m’aperçut, et me répéta sur tous les tons qu’il fallait être prudent. J’écoutai ses paroles avec la ferme intention de lui obéir ; mais j’eus le malheur de l’entendre, quelques instants après, dire à quelqu’un :

« Un brave enfant ! n’est-ce pas, Bob ? Il est sorti de la bonne souche, et sera un fameux marin, s’il vit assez pour cela. »

Cette remarque me fit penser que mon audace n’avait pas déplu à mon patron, et sa recommandation de ne pas quitter le rivage n’eut plus d’effet sur moi.