Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/78

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les jambes dans l’eau. Toutefois, cette ligne était-elle bien exacte ? Elle indiquait la hauteur des marées ordinaires, mais seulement quand la mer était calme ; et la brise était alors assez forte pour soulever les vagues à plus de cinquante centimètres. S’il en était ainsi, les deux tiers de mon corps seraient submergés, sans compter la crête des lames qui lanceraient leur écume au-dessus de ma tête. Supposez maintenant que la brise continuât à fraîchir, supposez une tempête, même un simple coup de vent, à quoi me servirait mon tas de pierres ? J’avais vu plus d’une fois, quand la mer était furieuse, ses lames fouetter l’écueil, et s’élancer au-dessus du signal à une hauteur de plusieurs mètres.

J’étais perdu sans retour si le vent devenait plus fort.

Il est vrai que toutes les chances étaient en ma faveur. Nous étions au mois de mai ; le ciel avait été admirable pendant la matinée ; mais il y a des tempêtes, même dans les plus beaux jours, et le temps, qui paraît doux et calme sur la grève, est souvent orageux en pleine mer. Du reste, il n’était pas nécessaire qu’il y eût un ouragan ; une brise un peu fraîche suffirait à m’emporter du monceau de pierres qui me servaient de point d’appui.

Et quand même le temps fût resté beau, la solidité de mon cairn m’inspirait peu de confiance.