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PHILOSOPHIE.


sophie qui examine sévèrement ces axiomes de la sagesse populaire, ne s’arrête pas à ces apparences grossières ; elle restitue au temps la souveraineté éternelle dont les religions révélées l’avaient dépouillée et elle fait plus encore : elle supprime la mort et, si je puis dire, elle la tue.

Qu’est-ce donc que la vie ? « Elle n’est qu’une suite d’actions et de réactions. Le sentiment et la vie sont éternels. Ce qui vit a toujours vécu et vivra sans fin. La seule différence que je conçoive entre la mort et la vie, c’est qu’à présent vous vivez en masse et que, dissous, épars en molécules, dans vingt ans, vous vivrez en détail. » Et Diderot éclate enfin dans une dernière hypothèse qu’il proclame « essentielle à la fois au progrès de la physique expérimentale, à celui de la philosophie rationnelle, à la découverte et à l’explication des phénomènes qui dépendent de l’imagination » ; hypothèse admirable et qui est, en effet, tout le transformisme : « De même que, dans le règne animal et végétal, un individu commence, pour ainsi dire, s’accroît, dure, dépérit et passe, n’en serait-il pas de même des espèces entières ? » Il conclut dès lors, avec une restriction de pure forme, « que l’animalité avait de toute éternité ses éléments particuliers, épars et confondus dans la masse de la matière ; qu’il est arrivé à ces éléments de se réunir parce qu’il était possible que cela se fît ; que l’embryon formé de ces éléments a passé par une infinité d’organisations et de développements ; qu’il a eu,

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