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DIDEROT.


une étude sur la science du commerce et une étude sur l’acoustique suivie du projet d’un nouvel orgue, des éléments de physiologie et l’essai historique sur les règnes de Claude et de Néron, un examen de la développante du cercle et trois volumes de critique d’art, un traité sur l’interprétation de la nature et un autre sur la pantomime dramatique. Sur quelque question et à quelque heure du jour que ce soit, vous ne le prendrez jamais au dépourvu. L’improvisation est sa loi. De la même plume qui écrit d’un trait, pour la corporation des libraires, la lettre sur le commerce de la librairie, il compose en une matinée, interrompant on ne sait quel autre travail sur la mécanique ou sur la chirurgie, le fragment exquis : Térence était esclave… que M. Suard attend pour finir son journal sous presse.

Si la patience du chef-d’œuvre lui fait défaut, il a, plus que tout autre, le don de l’interprétation universelle. Il entre, avec une même aisance, dans tous les sujets, dans tous les rôles, dans tous les personnages les plus opposés, également servi dans ses métamorphoses successives par son intelligence, qui est ouverte à toutes choses, et par son esprit, qui tourne à tous les vents. Faisant le tour de toutes les questions, il en voit toutes les faces, sous une même lumière toujours crue et, sans avoir la force de s’arrêter à une vue d’ensemble, plaide avec la même passion aujourd’hui le pour et demain le contre.

Dirai-je que c’est là encore le propre du journaliste que le courant des choses entraîne sans qu’il