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CHAPITRE QUINZIÈME

Il ne lui serait jamais venu à l’esprit d’oser manifester une autre volonté que celle de son père, mais, comme il n’avait aucune inclination pour le mariage, il chercha à atermoyer, et Charles-Albert, occupé avant tout de la guerre, ne songea pas à le presser. Sur ces entrefaites, le duc de Gênes avait fait à Novare la connaissance d’une femme de la bourgeoisie, beaucoup plus âgée que lui et pas jolie du tout, mais spirituelle et fort intrigante, qui sut si bien s’emparer de son esprit, et même, disait-on, de son cœur, qu’il n’agissait plus que sous son influence. La reine, désolée de cette inclination qu’elle trouvait fort dangereuse, lui fit parler par une de ses amies qui avait été la confidente du jeune prince lors de ses deux mariages manqués. Il protesta que Mme P… n’avait jamais été qu’une amie, que son cœur était irrévocablement mort à l’amour, et qu’il était prêt à épouser la princesse de Saxe puisque cela convenait à ses parents. À la mort de Charles-Albert il dit : « Je désire maintenant épouser la princesse de Saxe pour honorer ainsi la volonté de mon père. »

Le mariage fut célébré le 22 avril 1850. Le duc de Gênes parut heureux et content ; la jeune duchesse qui avait peine à se soumettre à l’étiquette des cours avait beaucoup de vivacité et de bonne grâce ; elle était aimable et spirituelle.