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MES SOUVENIRS

M. Thouvenel, si opposé à la guerre quelques mois auparavant, écrivait le 25 septembre 1853 : « Si notre escadre fût entrée dans les Dardanelles quand les Russes passèrent le Pruth, les affaires seraient beaucoup moins embrouillées ; mais, enfin, mieux vaut tard que jamais. L’occupation des principautés danubiennes par la Russie délie la Porte des stipulations du traité de 1841 (convention des Détroits) sans l’obliger de déclarer la guerre à la Russie. M. Thouvenel ajoutait mélancoliquement : « L’Autriche fausse compagnie à la France : la Prusse veut l’imiter. » En répondant à la dénonciation des hostilités, l’empereur Nicolas avait déclaré avec une modération simulée qu’il se tiendrait sur la défensive. « Nous n’attaquerons pas, avait dit M. de Nesselrode à sir Hamilton Seymour, nous resterons l’arme au pied, résolus seulement à repousser toute agression soit dans les principautés, soit dans les provinces asiatiques, où nous avons renforcé nos régiments. Nous resterons ainsi, pendant l’hiver, prêts à recevoir les ouvertures pacifiques qui nous seraient faites par la Turquie[1]. »

Lorsque je revins à Paris, à la fin d’octobre 1853, la situation était des plus tendues. Les femmes de

  1. Pierre de la Gorce, Histoire du second Empire.