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Page:Reland - Institutions du droit mahométan relatives à la guerre sainte, trad. Solvet, 1838.djvu/22

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c’est-à-dire, comme une chose qu’il est bien de ne pas faire, mais dont on n’est pas obligé de s’abstenir. D’autres au contraire sont d’avis que cet acte n’est illicite que lorsque l’on a lieu de penser qu’il se trouve des Musulmans dans les pays occupés par l’ennemi.

Les actes recommandés par la sonna ou la tradition, actes bons et méritoires pour celui qui les fait, mais non d’obligation étroite, sont :

1° Que sur le champ de bataille et avant d’en venir aux mains, tous les combattans récitent la prière qu’autrefois, dit-on, Mahomet adressa lui-même à Dieu et dont voici la formule : « ô Dieu ! toi qui as fait descendre ton livre des cieux (le Koran), qui tiens un compte exact des actions des hommes et qui imprimes le mouvement aux nuées célestes, mets en fuite les troupes ennemies ; ô toi, toi qui consoles les affligés et qui écoutes les prières des malheureux ! ô toi, qui guéris les plus grands maux, dissipes mon inquiétude ! Tu connais ma situation et celle de mes compagnons, et ton secours me suffit à moi ainsi qu’à ce peuple qui t’appartient, contre mon ennemi. »

2° Que le Prince exige des siens la promesse de ne point lâcher pied dans le combat et qu’il s’informe avec soin par des éclaireurs de tout ce qui concerne l’ennemi.

3° Qu’il se mette en marche le jeudi avec l’armée rangée en bon ordre et divisée en différens corps, subdivisés eux-mêmes en cohortes, après avoir donné le mot de ralliement pour se reconnaître pendant la nuit.

Mais pourquoi, dira-t’on, se mettre en marche plutôt le jeudi qu’un autre jour ? c’est, peut-être, parceque le jeudi s’appelle en arabe ïaum el khamis, le cinquième jour (de la semaine) ; or le même mot khamis signifie aussi armée ; une armée chez les Musulmans étant ordinairement composée de cinq parties, l’avant-garde, le corps de bataille, l’arrière-garde et les deux ailes. De la double acception du mot sera venue naturellement l’idée qu’il fallait se mettre en marche le cinquième jour de la semaine ou le jeudi, selon notre manière de compter[1]. De même chez les Athéniens, la loi défendait

  1. Quoiqu’il en soit de cette opinion il est certain que les Musulmans ont dans la semaine leurs jours heureux et malheureux et que le jeudi fait partie des premiers. Niebuhr rapporte que les lundi, jeudi et samedi sont regardés en Arabie comme des jours heureux pour se mettre en voyage. V. Descript. de l’Arab. éd. de 1779 t. 1, p. 182. Au reste cette superstition se retrouve dans tous les tems et dans tous les pays.