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de la peſte de Marſeille


de jours celui des morts. Il eſt aiſé de ſe figurer la déſolation de ces familles ainſi éparſes dans les campagnes, quand le mal les oblige de décamper & de rentrer dans la Ville. L’un porte un enfant mourant ſur ſes épaules, l’autre ſe traîne à demi mort dans les chemins ; tantôt c’eſt toute une famille, qui par la lenteur de ſa marche annonce ſes malheurs à tous ceux qu’elle rencontre, tantôt ce ſont des enfans qui ſoûtiennent leur pere prêt à expirer, & qui tâchent de l’amener juſqu’à la Ville, dans l’eſperance de le faire ſecourir. L’un porte avec lui ſon équipage, l’autre n’a pas eu la force de l’emporter : pluſieurs tombent par défaillance dans les chemins, & ces cadavres étendus arrêtent les paſſants. Enfin tous ces gens-là viennent augmenter le trouble de la Ville, & l’horreur de nos Places publiques.

Les portes de la Ville n’étant pas encore gardées, les Payſans de la campagne entroient librement dans la Ville, & quoiqu’ils n’y vinſent pas en foule comme à l’ordinaire, retenus par la crainte de prendre le mal, il y

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