Page:René Benjamin - Gaspard, 1915.djvu/178

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donnant, il renversa la tête sur son oreiller souple, et d’une voix toute émue, grosse de tendresse et de gratitude, d’une voix lente et profonde qui n’était que le soupir de son àme, il lâcha, ce brave — et simplement, candidement, purement, — le petit mot parfois si vaste du général Cambronne.

Comment dépeindre l’effet, le saisissement, puis la joie et le succès, la « conquête » du dortoir par ce vocable unique ? On se regarda d’abord ; mais un rire s’échappa du groupe des infirmières, et tout le monde s’approcha pour voir le « numéro ».

C’est que tout le monde, hommes et femmes, et les plus fines d’entre elles, d’emblée avait senti au vif ce qu’il y avait de fort, de beau, de drôle et de si prenant chez ce grand gaillard de Parisien, au mot brutal, au geste fruste, mais au cœur franc et clair comme un printemps dans l’Île-de-France.

Gaspard, pendant deux mois, devait être le roi de « l’hosteau ».