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Page:René Benjamin - Gaspard, 1915.djvu/240

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GASPARD

— T’occupe pas. Passe-mot quatorze sous qu’ j’aille chercher un litre.

— C’est vrai, dit Mousse très simplement, j’avais oublié.

Le lampiste empocha, disparut, rapporta du vin. Il le but avec Gaspard : l’agrégé ne buvait pas, ayant de l’entérite. En revanche, il fit toutes les lampes. Il oubliait l’heure : il était heureux.

Au bout de deux jours, catastrophe. L’adjudant de bataillon qui, dans une autre vie, comme Dupouya, avait été chien de berger, renifla et s’aperçut que ce Mousse et ce Gaspard répandaient une horrible odeur :

— Qu’est-ce que vous fabriquez, dites donc ? Est-ce que vous sortiriez de la lampisterie, par hasard ?

— Mon ad… mon adjudant, dit l’agrégé, ça nous occupe.

— Ça vous ?… Tonnerre de Dieu ! Mais à quoi ça sert qu’on vous ait déclarés inaptes ? Ils sont empoisonnants ces êtres-là ! Bons à rien, et vous rasez un régiment : on ne pense qu’à vous deux. Faut toute la journée vous trouver des emplois ! On n’est pas en paix : c’est la guerre, sacré bon Dieu ! Tout le monde s’embête !

— Personne autant que nous.

L’adjudant aurait voulu les voir morts sur