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Page:René Benjamin - Gaspard, 1915.djvu/269

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trouille devant les Boches… Alors, j’ vas t’ dire, poteau : j’ voulais, au moment de l’ quitter, comprends-tu… en souvenir… y laisser des escargots qu’ j’y ai rapportés d’ Pantruche, d’ chez nous, quoi… du gros Bourgogne, quèque chose ed bath… Les v’là… prends…, et tu y donneras, veux-tu. Tu y diras : « Vous fâchez pas, ça vient d’ la noce à Gaspard, qui vous r’mercie d’ l’avoir espédié comme ça… » Voilà… Et pis tu m’écriras, hein, si… s’il a rigolé… Ça m’ f’rait plaisir si… s’il a rigolé… Moi, tu vois, j’ pars, j’ rigole… Et mon copain, M’sieur Mousse, qu’est un vrai copain, — ah ça, vieux, tous les deux on est copains, — ben r’garde-le : il rigole aussi… Qu’est-ce tu veux, c’est comme à la fête : Messieurs les Boches, prenez vos places et vos billets… et dans cinq minutes on r’commence !

Ils quittaient la caserne à vingt cette fois : ce n’était plus le grand départ pour la guerre ; c’était un petit renfort pour une compagnie du front. Seulement, avec Gaspard, même une poignée de vingt hommes prend tout de suite belle allure.

Il était au premier rang, à côté de son troisième grand ami, et de nouveau il s’en allait vers la bataille, d’un pas bien cadencé, avec un air goguenard. — Mousse, qui ne savait pas se donner une attitude, écoutait curieusement battre son cœur en marchant, et il s’étonnait que cette petite ville