Page:René Benjamin - Gaspard, 1915.djvu/279

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Une marmite… sur le village… à cinquante mètres. L’oreille de Gaspard retrouvait tout à coup le terrible bruit de la guerre, et Mousse, qui montait l’échelle, resta figé par la violence de l’éclatement.

Dehors, les hommes n’avaient pas l’air émus. Plusieurs bourraient des pipes.

— En route ! fit le sergent.

Ils étaient une cinquantaine, des pieux à la main. Ils se mirent tant bien que mal quatre par quatre, et ils suivirent d’un pas lent, dans la boue.

Bjjj !… Vvvv ! Bong ! Rangg !

Encore une. À cent mètres, la chaussée de la route explosa dans toute sa largeur.

— Mais… mais on est foutus, dit Gaspard.

Et il regrogna encore ; « Pauv’mère, si tu voyais ton fils ! »

Quelqu’un dit :

— T’en fais pas : on va prendre el boyau.

Trois pas dans un champ, où les pieds enfonçaient jusqu’aux chevilles, et l’on descendit entre deux sillons, dans un mince couloir où l’on enfonçait jusqu’aux genoux. Ce n’était plus de la terre, mais de la vase, et le boyau, plus haut qu’un homme, était si étroit que le sac et le fusil s’accrochaient.

— V’là mon flingue bouché ! dit Gaspard.