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médiocres, cadeaux d’amis, puis des ébauches, des plâtres, et au milieu de la pièce, sur un chevalet drapé avec une étoffe sombre, le portrait de l’adorée.

Ce fut là ce que Lise Olsdorf vit tout d’abord, et pleine de reconnaissance et d’amour, elle se jeta dans les bras de son amant, en lui disant avec passion :

— C’est en attendant l’autre, n’est-ce pas ?

L’autre, c’était cette toile que le Roumain avait esquissée au château et que la princesse n’avait osé lui laisser achever.

Mais ce qui frappa ensuite la maîtresse de l’artiste, ce fut le peu d’élégance de cet atelier.

Elle en prit, pour ainsi dire, note en détail, et le lendemain, Paul vit arriver chez lui tout un choix superbe de fantastiques soieries japonaises.

Ces objets étaient accompagnés de ces seuls mots :

« À son peintre ordinaire, la princesse Olsdorf. »

Le jeune homme eut un moment la pensée de refuser ce cadeau, mais il eut peur de froisser Lise trop douloureusement, et comme il était de fort bonne heure et qu’elle ne devait venir que dans l’après-midi, il envoya chercher dans le voisinage un tapissier avec lequel il se mit au travail.

En moins de vingt minutes la pièce fut transformée. Le badigeon triste et grisâtre des grands murs avait disparu sous des tentures habilement drapées ; d’épais tapis cachaient et égalisaient le plancher raboteux, et le large divan avait pris une physionomie orientale en se faisant moelleux sous une grande pièce de cachemire à dessins multicolores. Meyrin était tout fier de son œuvre et la contemplait avec orgueil, sans trop se souvenir de la source de toutes ces richesses, lorsque la porte s’ouvrit brusquement pour livrer passage à Sarah, qu’il avait complètement oubliée.

— Sapristi ! s’écria-t-elle, en s’arrêtant un instant sur le seuil de l’atelier, c’est superbe ici ; on se croirait chez Carolus ! Tu es donc devenu millionnaire depuis vingt-quatre heures ! C’était pour me faire cette surprise que tu m’avais défendu de venir ? Ça, c’est aimable !