Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/66

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Il était trop tard.

On avait frappé à la porte et, sans en attendre l’autorisation, on était entré.

C’était bien la princesse Olsdorf !

Tout d’abord elle ne vit pas Sarah et fit un mouvement pour courir à Paul, mais en apercevant cette jeune femme dont les grands yeux noirs s’étaient étrangement fixés sur elle, Lise eut aussitôt le sentiment qu’elle était en présence d’une rivale.

Une transformation complète se fit alors dans sa physionomie. La maîtresse faisant aussitôt place à la grande dame, d’un ton à la fois ironique et protecteur, elle dit au peintre :

— Toutes mes excuses, monsieur Meyrin ; je vous croyais seul !

— Mais, madame, balbutia l’artiste, qui ne savait trop ce qu’il disait et se serait voulu à cent pieds sous terre, c’est à peu près comme si j’étais seul. Mademoiselle n’est pas une étrangère ; c’est un charmant modèle que les femmes du meilleur monde rencontrent souvent dans mon atelier et chez mes plus illustres confrères.

— Mademoiselle est, en effet, fort belle, bien faite pour provoquer l’inspiration, fit la princesse avec un sourire qui blessa si profondément Sarah qu’elle reprit aussitôt, de sa voix chaude :

— Monsieur pourrait ajouter que ses amis, ainsi que lui-même, me témoignent un peu d’affection.

Paul comprit que les choses ne tarderaient pas à se gâter s’il n’y mettait bon ordre, mais peu accoutumé à ces sortes de conflits, il allait bien certainement commettre quelque nouvelle maladresse lorsque la princesse, le prenant sans doute en pitié, lui dit, en se dirigeant vers la porte.

— Cher monsieur, je ne veux pas vous empêcher de travailler ; vous avez probablement séance ; je vous laisse, mais à ce soir. Vous n’avez pas oublié que nous devons dîner ensemble et aller ensuite à l’Opéra.

— Madame, fit Meyrin, avec un mouvement pour s’opposer au départ de l’étrangère.