Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/229

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— Que vous êtes bon, monsieur, de ne pas m’avoir oublié !

— Je vous ai si peu oublié qu’à peine dans l’arsenal, j’ai demandé après vous, et j’ai appris avec un vif plaisir que votre bonne conduite vous a mérité des faveurs qu’on n’accorde que bien difficilement ici. Voyons, causons un peu. Asseyez-vous là, près de moi ! Ça n’est pas contraire aux règlements ?

Il adressait ces derniers mots au sous-officier que la direction du port lui avait donné pour cicérone.

— Non, du tout, répondit l’adjudant, et même, afin de ne pas vous gêner, je vous laisse seuls. Vous me retrouverez là-bas, devant la mâture.

Et il s’éloigna.

Jean prit place auprès de Me  Duval sur l’un des bancs adossés à la muraille du commissariat et, pour satisfaire au désir de son compatriote, il lui raconta comment il avait passé les trois années qui s’étaient écoulées depuis sa condamnation.

— —Malheureux garçon ! fit l’avocat, lorsque Mourel eut terminé son récit, vous avez eu bien du courage. Il faut persister à en avoir. Je ne désespère pas d’obtenir pour vous, d’ici à deux ou trois ans, une réduction de peine. Du reste, la situation des pensionnaires des bagnes va être modifiée du tout au tout, et il sera facile aux bons sujets de se créer une existence moins pénible.

— Comment cela ?

— Le gouvernement vient de faire voter par les Chambres une loi qui lui permet d’établir à la Guyane des pénitenciers où seront transportés les condamnés nouveaux, lorsque leur peine atteindra un certain