Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/298

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git pas maintenant de vous laisser abattre ! Vous devez au contraire mettre un masque impénétrable sur votre visage, pour votre fille, pour tout le monde. On ne supposera pas que cet homme a trouvé la mort chez vous. On croira qu’il a été victime d’une agression nocturne.

— Et lorsqu’on saura son nom ! dit la pauvre femme avec un frisson d’horreur ; si on apprend qu’il était mon mari, est-ce que la justice ne se demandera pas pourquoi son cadavre a été ramassé à deux pas de ma porte ? Alors on dira que je l’ai tué pour me défaire de lui, que je lui ai tendu un guet-apens. Ah ! je suis bien perdue ! Et ma fille, ma Claude bien aimée !

La malheureuse sanglotait de nouveau.

— D’abord, reprit Guerrard, on ne découvrira peut-être rien de ce que vous craignez. Il se peut parfaitement que cet individu n’ait sur lui aucun papier de nature à mettre sur les traces de son identité, et il est probable qu’il n’a aucune relation à Paris. La police s’intéresse peu aux inconnus ; elle ne multipliera pas ses recherches. Mais enfin, soit ! admettons qu’on reconnaisse en lui le condamné d’il y a vingt ans, cela ne conduira pas forcément à découvrir que vous étiez sa femme. On ignore le nom que vous portiez jadis. À Reims même, cinq ou six vieux amis à peine s’en souviennent, et certes, en acceptant que leur attention soit éveillée par l’événement, ils garderont le silence. Ce n’est pas Mme  Ronsart qui parlera. Or, elle seule et moi connaissons ce secret. Est-ce que même je m’en serais jamais douté, si vous ne me l’aviez pas révélé tout à l’heure !