Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/392

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par respect pour mon nom, devenu le vôtre, vous hésiterez à nous livrer à la malignité publique par un débat qui mettrait en évidence des choses dont la révélation ne vous serait pas plus agréable qu’à moi.

— Je ne vous comprends pas ! Si naïve que je sois, je sais qu’une action en séparation de biens ne cause de scandale que si l’époux contre qui elle est dirigée se défend.

— Je vois que vous avez déjà pris vos renseignements. C’est fort bien, agissez à votre guise ! En attendant, tâchez seulement pour mon fils, pour nos amis et pour nos gens de ne pas vous poser en victime. J’avoue que je comptais sur plus d’intelligence et plus de reconnaissance de votre part.

Cela dit, sans s’inquiéter de l’effet que produisaient sur sa femme ses odieuses paroles, le duc tourna les talons et sortit.

— Allons, c’est bien fini, gémit Mme de Blangy-Portal après le départ de son mari, me voilà vraiment seule ! Il ne reviendra jamais à moi, qui, d’ailleurs, ne voudrais, à aucun prix, revenir à lui ! Ah ! maudit soit le jour où la docteur et ma mère ont eu la mauvaise pensée de me vendre pour un titre de duchesse… Duchesse ! Que ne suis-je plutôt restée l’enfant sans nom que j’étais, ou que ne m’a-t-on donné un mari qui n’aurait pas eu le droit de se croire au-dessus de moi et m’aurait aimée ! Et ne pouvoir briser cette horrible chaîne !… Y être rivée pour toujours !…

Car la malheureuse ne songeait plus à quitter Houlgate, elle s’y sentait prisonnière par la volonté du maître qui venait de se révéler à elle dans toute sa duplicité.