Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/95

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de la rue de Prony, que son millionnaire protecteur avait fait construire tout exprès pour elle, sur un des lots de terrain qu’il avait achetés à l’époque où avait commencé la transformation de la plaine Monceau.

La belle Frémerol redevenait là l’élégante à la mode, la demi-mondaine dont les fêtes faisaient courir le tout-Paris viveur, à la grande joie du vaniteux industriel, qui payait et payait toujours sans marchander.

La séduisante jeune femme manquait certainement d’instruction sérieuse, mais elle avait un tact inné, suffisamment d’esprit, surtout beaucoup de finesse et de bon sens, et elle avait su grouper autour d’elle des littérateurs, des artistes, des hommes du meilleur monde qui, pleins d’indulgence pour les sources de son luxe, ne voyaient en elle que l’hôtesse charmante dont la maison était des plus agréables.

Pendant les premiers mois qui suivirent la guérison de Claude, Paul Guerrard alla de temps en temps rue de Prony, où il était accueilli en intime, puis ses visites s’espacèrent, jusqu’au jour où, complètement pris par ses travaux, il renonça presque tout à fait à voir la belle pécheresse.

Néanmoins, lorsque le hasard la lui faisait rencontrer, il échangeait avec elle un salut amical et même quelques paroles affectueuses, et quand il perdit son père, Geneviève ne manqua pas de lui adresser une lettre des plus touchantes.

Plusieurs années s’écoulèrent ainsi et le docteur, qui l’était resté si peu, n’avait plus aperçu que de loin en loin Mme  Frémerol, car, par une sorte de pudeur, il n’avait osé se représenter en désœuvré dans cette maison ou il était entré comme médecin, quand il