« Mais ils retombèrent à l’instant, et sir Melvil vit la convulsion de l’agonie passer sur le visage de sa fille.
« Elle s’efforçait de respirer et levait ses petites mains.
« Sir Albert, lady Melvil, qu’on avait également prévenue, et Soulami étaient là, immobiles, haletants, lorsque le docteur entra.
« Il jeta un regard sur l’enfant et demanda :
« — Est-elle dans ce nouvel état depuis longtemps ?
« — Depuis minuit, répondit le pauvre père à travers un sanglot !
« Le docteur s’était penché sur l’enfant, appelant toute sa science à son secours.
« Sir et lady Melvil priaient Dieu.
« On n’entendait au milieu de ce silence navrant que les battements du balancier de la pendule qui semblait hâter sa marche.
« Soudain le médecin se releva.
« — Sir Albert, dit-il en prenant les mains du malheureux, courage ! tout n’est peut-être pas perdu. Voyons, soyez fort ; une crise heureuse peut sauver votre enfant. Si elle se produit d’ici à quelques heures, je réponds d’elle. Je ne vous quitte pas, attendons !
« Il était près d’une heure du matin.
« Le reste de la nuit se passa, pour ceux qui assistaient à cette lutte de la mort et de la vie, en alternatives inénarrables de joies et de désespoirs. Lady Melvil ne voulut pas se retirer un instant chez elle.
« Quant à Soulami, il veillait sur Ada comme un avare sur un trésor.
« Au moment où le jour se levait, où la brise du large semblait donner une vie nouvelle à toute la nature, l’enfant fit un mouvement, et tous les assistants se rapprochèrent.
« Le docteur prit la main d’Ada, elle était moins brûlante ; il écouta les battements de son cœur, ils étaient réguliers ; il interrogea sa respiration, elle était lente et facile. Ses yeux étaient entr’ouverts, ses lèvres essayaient un sourire. Elle semblait sortir d’un long et douloureux rêve.
« Le père et la mère attendaient toujours, mais ils espéraient déjà.
« Lorsque le médecin se tourna vers eux, le visage illuminé d’un noble orgueil, ils n’eurent pas besoin de l’interroger. Ses yeux en disaient plus que toutes les phrases :
« Ada était sauvée !
« Je ne vous ferai pas le tableau de cette joie immense, remplaçant subitement les plus vives alarmes. Que ceux que le ciel a épargnés, après avoir un instant arrêté sur eux sa colère, se souviennent. Qu’ils se rappellent tout ce qu’il y a de poignant dans les douleurs de ces pauvres êtres, qu’on ne peut questionner, dont l’existence ne tient à rien, qui sont