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être dans une des salles d’attente du tribunal. S’il ne s’y trouve pas, que des gardes aillent l’arrêter et l’amènent sans nul retard devant nous !


XXIII

LE VALET DE CHAMBRE DE SIR WILLIAM BENTICK.



L’émotion de l’auditoire ne saurait se décrire, et elle devint plus grande encore lorsque peu d’instants après l’ordre de l’honorable magistrat, on vit apparaître quatre huissiers, entraînant de force un homme qui se débattait.

C’était Gilbert Patterson.

Ce Gilbert était un homme de quarante ans environ, gros et court. Il était d’une pâleur livide. Ses yeux exprimaient une épouvante voisine de la folie. Ses vêtements étaient en désordre.

— Gilbert, lui dit son maître, sir Harry Temple, que voici, assure que vous faites partie de la société des Thugs ?

— C’est vrai, murmura Gilbert d’une voix farouche.

— Misérable ! s’écria le noble lord, ne pouvant contenir son indignation.

La salle entière se leva, emportée par un même mouvement de colère aveugle, et les soldats eurent peine à empêcher les personnes placées sur les premiers bancs de se précipiter sur Patterson.

— Silence ! ordonna le président ; s’ils se produisait encore un mouvement pareil, je serais forcé de faire évacuer la salle.

— Vous, Gilbert, tâchez, par des aveux complets et sincères, d’atténuer l’horreur de votre crime.

— Mon crime ! dit le valet de chambre d’une voix éclatante. Eh bien ! Oui, j’ai été l’instrument de ces misérables assassins. Oui, je les ai servis ! Mais, avant de me juger, écoutez-moi.

« Un soir, il y a trois ans, Sa Seigneurie s’en souvient, mon fils unique disparut. On l’avait vu dans la journée jouer au bord de l’eau, je le crus noyé, perdu. Je le pleurais, lorsqu’un inconnu me remit un billet non signé qui m’assignait un rendez-vous à minuit, derrière les jardins de mylord. On me prévenait qu’on me donnerait des nouvelles de mon enfant.

« À minuit, j’étais au rendez-vous. J’attendais depuis dix minutes environ, lorsque je fus tout à coup entouré par plusieurs hommes. Je sentis sur ma gorge la pointe d’un poignard, et en même temps une voix menaçante me disait :

« — Silence ! ou tu es mort.