Page:René de Pont-Jest - Le Procès des Thugs.djvu/304

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Au même instant, pénétraient dans le cimetière par la porte qui était restée ouverte, plusieurs Hindous. Ils gagnèrent également, en se glissant dans l’ombre, l’endroit vers lequel s’était dirigé Sania.

Du reste ceux qui portaient le cercueil et ceux qui l’escortaient avaient trop hâte d’en finir pour s’inquiéter de ce qui se passait autour d’eux.

La pluie tombait toujours et l’orage était dans toute sa force.

Arrivé dans un des endroits les plus reculés de la nécropole, le cortège s’arrêta, et Sania, après avoir donné sa torche à un des soldats, se mit à creuser la fosse.

Miss Ada fit signe à ses hommes de ne pas aller plus loin.

Dix pas la séparaient à peine du cercueil que les porteurs avaient déposé sur le sol et contre lequel s’était agenouillée Sita.

L’Anglaise ne la quittait pas du regard.

L’œuvre avançait lentement ; la terre, délayée par la pluie, était pesante, et chaque pelletée qu’il soulevait coûtait au robuste vieillard un violent effort.

Les soldats voulurent alors l’aider ; chacun prit à son tour l’instrument du fossoyeur et le trou fut bientôt assez profond.

Vingt minutes à peu près avaient suffi à ce lugubre travail.

Lorsque Sania s’approcha de la bière pour la soulever avec les porteurs, à l’étonnement de Stilson, Sita ne fit entendre aucune plainte.

Elle s’était redressée, et, les yeux au ciel, la physionomie inspirée, semblait ne plus attendre que d’en haut secours et protection.

Le lourd cercueil glissa sur le sable humide et disparut dans la fosse béante.

Puis on entendit les pelletées de terre tomber lourdement sur les planches.

Aux lueurs vacillantes de la torche, Ada vit le trou se combler rapidement et le sol reprendre son niveau.

Lorsqu’elle leva la tête, elle n’aperçut plus cette femme dont la présence lui avait paru inexplicable.

Sita avait disparu.

Elle sentit alors son cœur soulagé d’un poids énorme, et elle ne songea plus qu’à suivre des yeux les soldats et les porteurs qui faisaient leurs préparatifs de départ.

Le gros Stilson les pressait, ne cachant pas sa joie que tout fût terminé. Il serait certainement parti seul en avant si l’obscurité lui avait permis de se diriger.

Sania donna enfin le signal de la retraite et reprit sa torche pour les guider dans le dédale des tombeaux.