Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/129

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mais il redoutait à ce point l’effet que ce scandale allait causer dans le monde clérical, auquel il se flattait toujours d’appartenir, qu’il avait manœuvré dans le même sens que son adversaire pour que l’affaire sortît du rôle sans plus long retard, puisqu’il n’avait pu obtenir de M. Mansart qu’il renonçât à sa demande en nullité de mariage, pour se borner à une requête en séparation de corps ; affaire dans laquelle il n’aurait plus joué, lui, qu’un rôle effacé, tout à fait secondaire.

Mais le vieil ami de Mme  Bertin n’avait pas donné dans ce piège, tout en ne se dissimulant pas les difficultés de sa tâche. Il n’ignorait pas à quel parti pris, à quelle interprétation surannée et arbitraire des textes il allait se heurter. Néanmoins, il avait tenu bon, jugeant sainement qu’une action en séparation de corps intentée contre M. Noblet serait repoussée, car sa conduite de mari ne donnait lieu en réalité à aucun reproche grave, tandis qu’il espérait pouvoir démontrer que le mariage de Mlle  de Tiessant avait été tout à la fois clandestin, irrégulier et le fait d’une violence morale exercée sur une jeune fille de moins de seize ans.

C’est donc en cet état que l’affaire vint un mardi devant la première chambre du tribunal de la Seine.

M. de Tiessant avait pris place avec son gendre auprès de Me  Dutreil ; Me  Mansart, au contraire, était seul à son banc, Éva n’ayant pas songé une seconde à se donner en spectacle ni à se retrouver en face de son père et de son mari. Son avocat l’avait