Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/193

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— Du courage, madame, vous ne trouverez ici que des consolatrices. Personne ne vous troublera, vous prendrez même vos repas chez vous. La nuit ne tardera pas à venir. Voulez-vous que je vous aide à vous installer ? Vous ne pouvez rester ainsi vêtue. L’heure du dîner a sonné. Mangez un peu, pour reprendre des forces.

— Merci, ma sœur, répondit Mme  Noblet en se levant brusquement ; je n’ai besoin de rien. Oh ! je n’ai pas faim !

Elle avait atteint sa valise, d’où, machinalement, elle retira tout ce qui s’y trouvait, prenant les choses au hasard de ses petites mains qu’agitait un tremblement nerveux. Ensuite elle se décoiffa et se débarrassa de son manteau.

La supérieure alors ne put réprimer un mouvement d’admiration et de pitié, en remarquant combien sa nouvelle pensionnaire était jolie, avec sa taille svelte, son buste gracieux, sa petite tête de vierge et sa forêt de cheveux noirs dont les doubles nattes se tordaient sur sa nuque.

Cependant Éva parcourait d’un regard inquiet, rapide, halluciné, cette petite pièce froide, nue, où d’autres avaient souffert, où elle était condamnée à vivre trois longs mois et dont elle venait de prendre possession en quelque sorte en s’y déshabillant à demi, et tout à coup, poussant un cri d’horreur, elle se jeta sur un des lits de fer, le visage enfoui dans la couverture, pour ne plus rien voir, ne plus rien entendre, et en sanglotant.