Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/257

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honorables, eh bien ! je laisserai là mes ambitions pour te revenir tout entière, sans arrière-pensée, sans remords. J’aurai fait mon devoir ; je me soumettrai à ma destinée. C’est que Dieu n’aura pas voulu que je sois autre chose qu’une femme aimée et toute à toi ! Ne me dis pas non, je t’en conjure ! D’ailleurs, tu viendras me voir souvent, et tu sais bien que, moi, d’esprit et d’âme je ne te quitterai pas un seul instant.

Elle avait enveloppé son amant de ses bras et ne le suppliait pas moins du regard que de la voix.

Gilbert, le cœur brisé, s’arma de courage et céda. Quinze jours plus tard, il installa lui-même Éva à Bordeaux dans un bel appartement sur les allées de Tourny, et après avoir assisté à son triomphe dans le Sphinx, pièce qu’elle avait choisie pour ses débuts, il revint à Paris, et commença bientôt l’existence fiévreuse à laquelle il s’était volontairement condamné pour deux années.

L’amoureux, en effet, avait espéré tout d’abord que la sagesse serait plus forte en lui que la passion et que, sûr de sa maîtresse comme il avait le droit de l’être, il s’accoutumerait à son absence, prendrait patience en recevant chaque jour de ses nouvelles, et se consolerait un peu avec l’enfant de l’éloignement de la mère.

C’était compter sans la jalousie, sentiment qu’il avait jusque-là ignoré, il est vrai, mais qui le mordit au cœur, lorsque les journaux lui apprirent les succès de beauté et de talent de celle que sa solitude