Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/358

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Éva jeta ses bras au cou de Jeanne, et les deux jeunes femmes passèrent ainsi quelques instants, échangeant des paroles fiévreuses, jusqu’au moment où Mme  Bertin, en arrivant dans la chambre de sa nièce, les força à se séparer.

Cependant elles réussirent à ce point à se dominer que la brave tante ne s’aperçut pas de leur émotion, et la journée s’écoula ensuite dans un tel calme que Ronçay, en rentrant aux Tilleuls, vers sept heures, ne put supposer un instant que son amie avait passé une nuit si péniblement agitée. Elle était aussi bien qu’au moment où il l’avait quittée, et cela le rendait doublement heureux, car Bernel lui avait fait savoir que ses devoirs professionnels le retiendraient probablement à Paris jusqu’au lendemain matin.

Le dîner terminé, on se réunit ainsi que d’habitude, auprès du lit d’Éva, qui pendant toute la soirée ne cessa de jouer avec sa fille et de sourire à Gilbert. Depuis bien longtemps, elle n’avait paru dans d’aussi bonnes dispositions d’esprit.

Ce fut seulement vers dix heures que, visiblement fatiguée, elle manifesta le désir de rester seule. Alors elle embrassa Blanche, dit bonsoir à sa tante, tendit le front à son amant, adressa un regard suppliant à sa femme de chambre, qui lui répondit tout bas, en arrangeant ses oreillers  : « Je vous l’ai juré, » et elle ferma les yeux.

Gilbert baissa un peu la lampe et sortit le dernier, sans bruit. Puis il gagna le perron, descen-